Le Canard brocarde, dans le numéro 3033 du 13 décembre 1978, l’appel de Cochin, un manifeste signé 7 jours auparavant par Jacques Chirac, de son lit d’hôpital, à Paris, où il a été transporté après un grave accident de voiture survenu sur une route verglacée en Corrèze. Chirac cumule alors les fonctions de maire de Paris, de député de la 3ème circonscription de la Corrèze, de président du conseil général du même département et, surtout, de président du RPR (Rassemblement Pour la République), le parti gaulliste.
Dans ce texte, Chirac dénonce le fédéralisme européen et affirme son souverainisme, à 6 mois des premières élections au suffrage universel direct du Parlement européen.
On attribue la paternité réelle de cette diatribe à ses proches conseillers, Pierre Juillet et Marie-France Garaud, notamment. Elle commence par un avertissement: « il est des heures dans l’histoire d’un peuple où sa sauvegarde tient toute dans sa capacité de discerner les menaces qu’on lui cache » et elle finit par cette charge violente: « comme toujours lorsqu’il s’agit du rabaissement de la France, le parti de l’étranger est à l’œuvre avec sa voix paisible et rassurante. Français, ne l’écoutez pas, c’est l’engourdissement qui précède la mort ».
« Le parti de l’étranger » est une allusion directe à l’Union pour la Démocratie Française (UDF), parti de centre-droit, créé par Valéry Giscard d’Estaing le 1er février de cette même année, adepte du supranationalisme. Cette expression, qui vise tous les partisans de l’Europe (pas seulement les giscardiens), aura un effet désastreux sur l’opinion.
Chirac est élu député européen, le RPR ayant obtenu 15 sièges et 16,31% des voix, loin cependant de la liste UDF, menée par Simone Veil, 25 sièges et 27,61% des voix.
SP