N° 11 du Canard Enchaîné – 13 Septembre 1916
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Premier article de Henri Béraud dans le Canard, sous le pseudonyme de « Carlos Umberto » et intitulé Des canons ! Des munitions ! – Henri Béraud met à profit une permission (lieutenant d’artillerie sur le front) le weekend précédent pour donner à Maurice Maréchal son premier papier… papier récupéré dans le « panier d’Anastasie » c’est à dire dans les articles précédemment refusés par la censure, étant alors signé de Charles Humbert…
L’article « Des Canons ! Des Munitions ! Chaque homme, chaque chose à sa place », signé par Henri Béraud sous le pseudonyme de Carlos Umberto dans Le Canard enchaîné du 13 septembre 1916, se lit avant tout comme une parodie mordante et truculente de la « grande presse » de l’époque et de ses célèbres « bourreurs de crânes ». Dans un contexte où les journaux traditionnels jouent souvent le rôle de relais patriotique aveugle, poussant à l’unisson la propagande de guerre, Béraud s’empare de leurs codes pour mieux les tourner en dérision.
Dès l’introduction, le ton grandiloquent imite parfaitement celui des éditoriaux exaltés : « Oui, la Victoire est certaine ! La France attend, dans une attitude de noble sérénité, l’heure inéluctable du triomphe ! ». Cette affirmation ampoulée, loin d’être prise au sérieux, installe immédiatement le décalage. Béraud pastiche l’élan patriotique naïf et exalté des journaux de l’arrière, soulignant par contraste la réalité bien plus complexe et tragique vécue au front.
En multipliant les exemples absurdes et décalés, Béraud parodie également les récits grandiloquents qui vantent l’organisation militaire et administrative. Par exemple, il raille « l’emploi des forces matérielles et industrielles de la France » en évoquant ironiquement la mobilisation des ressorts de sommiers pour fabriquer des engins balistiques. Cette moquerie vise la presse qui cherche à rassurer par des anecdotes héroïques ou techniques souvent ridicules et déconnectées de la réalité.
De même, les anecdotes sur les « tripiers » mobilisés pour nettoyer des boyaux de tranchées ou sur les « aspirants » exposés à des gaz asphyxiants illustrent à merveille l’incongruité des récits officiels relayés par les journaux. Ces scènes grotesques, décrites avec sérieux dans un pastiche parfait de la presse de l’époque, soulignent l’aveuglement et l’inefficacité des institutions qu’elle défend.
La conclusion de l’article offre un point culminant de l’ironie avec des recommandations d’une absurdité calculée : « Il serait bon d’apprendre à proximité des lignes quelques arts utiles, tels que la bijouterie, la maréchalerie, le tissage, le coutelier géant ou la racine de livarot. » En empruntant ce ton paternaliste et détaché à la presse de l’arrière, Béraud pointe le fossé béant entre les préoccupations des rédacteurs et celles des soldats, tout en ridiculisant la propension à proposer des solutions simplistes à des problèmes tragiques.
Sous couvert de patriotisme ostensible, cet article est une attaque cinglante contre les discours rassurants et édulcorés de la presse officielle. Béraud maîtrise l’art de la satire par le pastiche : il imite fidèlement les envolées et les arguments creux pour mieux en exposer le ridicule. Le résultat est une dénonciation implicite mais percutante du rôle complice de la grande presse, qui préfère « bourrer les crânes » plutôt que de relayer la réalité du front.
« Des Canons ! Des Munitions ! » est une parodie mordante, à la fois hilarante et accablante, des éditoriaux patriotiques et de la rhétorique des « bourreurs de crânes ». En détournant leurs codes, Béraud démasque la déconnexion entre la presse de l’arrière et la réalité du front, tout en dénonçant avec une verve caustique l’aveuglement et l’inefficacité des autorités qu’elle glorifie. Ce premier article de Béraud pour Le Canard enchaîné annonce son talent pour allier satire et critique sociale, faisant de lui une plume incontournable du journal.
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Les numéros d'avant-guerre, plus rares et donc proposés en quantités limitées, présentent souvent une usure, une fragilité plus importante. Les traces du temps, telles que jaunissement lié à l'insolation ou simplement la lumière, rousseurs, traces d'humidité, plis marqués, cassures du papier fréquemment dans les coins ou le long des plis, se sont plus ou moins installés sur ces publications dont le papier approche le siècle d'âge.
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Les numéros les plus anciens (de l'origine aux années 30), ont pu faire l'objet de restaurations, en fonction des besoins et dans les règles de l’art : réparations de déchirures, petits trous, renforcement des marges et des plis centraux au moyen de papier type Filmoplast, sans acide, reprise des faux plis au fer chaud.
L’évolution du format du Journal dans l’histoire :
De 1916 à 1921 : 31 X 43 cm - 4 pages -
De 1921 à 1940 : 37 X 54 cm - 4 pages -
De 1944 à 1948 : 30 X 43 cm - 4 pages -
Quelques très rares numéros sur 2 pages entre 1939 et 1945, impactés par la censure.
Le Canard ne retrouve son format d'avant-guerre qu'en 1948 :
De 1948 à 1957 : 38 X 60 cm - 4 pages* -
De 1957 à 1966 : 38 X 60 cm - 6 pages* -
De 1966 à 1987 : 38 X 60 cm - 8 pages* -
De 1988 à 2004 : 36 X 58 cm - 8 pages* -
*hors numéros spéciaux