N° 1346 du Canard Enchaîné – 10 Juillet 1946
39,00 €
Depuis sa naissance le 10 septembre 1915, le Canard enchaîné est toujours resté fidèle à son « pacifisme jusqu’au boutiste », réclamant, entre les 2 guerres mondiales, le désarmement intégral et unilatéral de la France. L’insoumission (refus d’exécuter un ordre), la désertion (abandon de poste d’un militaire en exercice) et, surtout, l’objection de conscience (refus préalable de se soumettre au service militaire) correspondaient bien à la sensibilité dominante au sein de sa rédaction. Ainsi, à l’instar de son journaliste Pierre Châtelain-Tailhade, déclaré insoumis en 1925 et réfugié en Belgique, Le Canard, tournant en ridicule le patriotisme, défendit farouchement bon nombre de réfractaires de toute nature.
René Gérin (1892 – 1957) fut un de ceux-là. Normalien, agrégé des Lettres, sorti de la guerre 14-18 avec 3 blessures, 4 citations, le grade de capitaine et la Légion d’honneur (qu’il rendit en 1926 par solidarité avec le pacifiste Georges Demartial), Gérin fut un militant pacifiste intégral, violemment hostile à l’antisémitisme hitlérien. Son livre, « Comment fut provoquée la guerre de 1914 », reçut un accueil favorable du Canard en juillet 1931, le qualifiant de « réquisitoire précis et irréfutable contre les responsables de la stupide boucherie de 1914. Quoi qu’en pense M. Herriot, il s’en trouve aussi de ce côté-ci du Rhin ».
Pour avoir renvoyé son fascicule de mobilisation, Gérin fut emprisonné quelques jours en octobre 1933, puis encore en 1935, dans le cadre de ses activités de secrétaire général de la Ligue internationale des combattants de la paix. Le Canard lui exprima sa solidarité, en appelant à assister aux meetings de soutien et en relayant la campagne d’opinion orchestrée en sa faveur.
En juillet 1945, pour avoir tenu pendant l’occupation la rubrique littéraire de L’Œuvre – journal collaborationniste de Marcel Déat – Gérin est condamné à 8 ans de travaux forcés, 10 ans d’interdiction de séjour et à l’indignité nationale à vie, par la cour de justice de la Seine. Peine jugée excessive par certains résistants et ramenée à 5 ans en février 1946, puis à 3 ans en juillet.
Dans le numéro du 10 juillet 1946, le rédacteur en chef du Canard, Pierre Bénard, prend à nouveau sa défense et écrit : « Cet hurluberlu aux yeux de bœuf pensif relève davantage de la rigolade que de la cour de justice », et, s’il fallait admettre que l’épuration fut impitoyable, du moins devait-elle l’être pour tout le monde. Or Gérin avait été lourdement condamné pour ses articles alors que « les directeurs, les administrateurs, les rédacteurs en chef avaient regagné leurs douillettes propriétés ». Bénard intervint en faveur de Gérin auprès du garde des Sceaux (Pierre-Henri Teitgen) par courrier du 11 février 1946. Il le remercia de son action par une nouvelle missive du 17 octobre 1946, car 14 jours avant, René Gérin avait été gracié.
S’il recouvra ses droits civiques et une carte de presse en 1950 (il entra au Figaro), il ne put jamais obtenir la révision de son procès.
SP
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Nos Exemplaires du Canard Enchaîné sont archivés dans de bonnes conditions de conservation (obscurité, hygrométrie maitrisée et faible température), ce qui s'avère indispensable pour des journaux anciens.
Lumière : obscurité complète. Les UV agissent sur la lignine du papier et opèrent un jaunissement, souvent visible sur des journaux pliés et empilés, ne voyant la lumière du jour que sur la tranche...Le jaunissement s'accentue avec le temps et rend le papier cassant (casse de la fibre de cellulose) et fragilisé au bout de quelques années.
Hygrométrie : le taux est compris entre 45 et 65 %. Un taux trop bas entraîne un dessèchement du papier, ce qui le raidit et le rend cassant. A l'inverse, un taux trop élevé peut favoriser l'apparition de traces de moisissures.
Faible température : la température idéale pour la conservation de vieux papiers est comprise entre 16 et 20°C. Une température trop élevée peut aussi assécher le papier et le rendre cassant jusqu'à l'émiettement et accélérer les processus chimiques de dégradation du papier. Une température trop faible favorise l'augmentation du taux d'hygrométrie.
Tous les numéros sont stockés à plat et pliés seulement en 2 (le pli est horizontal). Le pliage en 4 est à proscrire : le papier est fortement fragilisé à la jonction des deux plis, formant après quelques années un trou, au milieu de chaque page...). A fortiori, les pliages en 6 ou en 12 (longtemps utilisé pour les expéditions) génèrent d'importants dégâts sur le papier, dans le temps.
Certains numéros parmi les plus anciens sont archivés pleine page dépliée. La pliure centrale des fascicules, déjà présente lors de leur diffusion et de leur vente, constitue souvent une zone de dégradation accélérée du support : on y observe un jaunissement précoce du papier, signe d’une acidité et d’une fragilité importante. Le maintien de cette pliure ne fait qu’accentuer le processus de dégradation, et se traduit par des risques élevés de déchirures à la manipulation.
Les photos des Unes présentées sur le site correspondent à celles des exemplaires originaux proposés à la vente, ou celle d'exemplaires de qualité de conservation équivalente. Elles sont prises en lumière naturelle, sans filtres, les teintes visibles à l'écran pouvant ne pas refléter parfaitement celles du papier.
Les numéros d'avant-guerre, plus rares et donc proposés en quantités limitées, présentent souvent une usure, une fragilité plus importante. Les traces du temps, telles que jaunissement lié à l'insolation ou simplement la lumière, rousseurs, traces d'humidité, plis marqués, cassures du papier fréquemment dans les coins ou le long des plis, se sont plus ou moins installés sur ces publications dont le papier approche le siècle d'âge.
Les collections de journaux non reliés présentent un fort risque de dégradation. Conservés en liasses, parfois ficelées, les fascicules sont en effet particulièrement sensibles aux contraintes mécaniques (tassement, pliures). Hormis les numéros d'avant-guerre, devenant relativement rares, les autres numéros sont écartés de notre stock dès lors qu'ils présentent ces défauts impossibles à corriger, comme des pliures marquées, jaunies ou cassantes, notamment en verticalité du journal.
Les numéros les plus anciens (de l'origine aux années 30), ont pu faire l'objet de restaurations, en fonction des besoins et dans les règles de l’art : réparations de déchirures, petits trous, renforcement des marges et des plis centraux au moyen de papier type Filmoplast, sans acide, reprise des faux plis au fer chaud.
L’évolution du format du Journal dans l’histoire :
De 1916 à 1921 : 31 X 43 cm - 4 pages -
De 1921 à 1940 : 37 X 54 cm - 4 pages -
De 1944 à 1948 : 30 X 43 cm - 4 pages -
Quelques très rares numéros sur 2 pages entre 1939 et 1945, impactés par la censure.
Le Canard ne retrouve son format d'avant-guerre qu'en 1948 :
De 1948 à 1957 : 38 X 60 cm - 4 pages* -
De 1957 à 1966 : 38 X 60 cm - 6 pages* -
De 1966 à 1987 : 38 X 60 cm - 8 pages* -
De 1988 à 2004 : 36 X 58 cm - 8 pages* -
*hors numéros spéciaux