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N° 862 du Canard Enchaîné – 4 Janvier 1933

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Importantes déclarations de M. Jean Chiappe

4 janvier 1933 : le Canard ouvre l’année en se payant le préfet Jean Chiappe. Dans une fausse interview d’anthologie, Pierre Châtelain-Tailhade ridiculise l’homme d’ordre qui veut “rendre Paris sain” à coups de règlements et de matraques en caoutchouc. Satire prophétique d’un pays qui confond morale et répression, humour et coups de trique garantis.

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4 janvier 1933 : Pierre Châtelain-Tailhade croque Jean Chiappe, préfet d’ordre et de morale — un Paris sous matraque

Le premier Canard enchaîné de 1933 ouvre l’année avec une cible toute trouvée : Jean Chiappe, préfet de police de Paris depuis 1927, héros des conservateurs, cauchemar des gauchistes, et incarnation d’un ordre moral agressif et satisfait. Dans son article « Importantes déclarations de M. Jean Chiappe », Pierre Châtelain-Tailhade signe une fausse interview à la manière d’un dialogue de café du commerce. Le ton est brillant, féroce, et d’un humour plus noir que jamais. En quelques colonnes, le préfet apparaît comme un Napoléon de la matraque, persuadé de sauver la morale publique à coups de règlements absurdes et de gendarmes en caoutchouc.

Un préfet d’ordre dans un pays à bout de nerfs

Le contexte n’est pas anodin. En ce début de 1933, la Troisième République est épuisée : chômage, faillites, tensions sociales, scandales politiques… et une extrême droite de plus en plus agressive. À Paris, Jean Chiappe règne en maître sur la Préfecture. Il s’est taillé une réputation d’homme d’ordre intraitable : antisocialistes, antimétèques, anticommunistes, il est l’ami des ligues nationalistes et le cauchemar du Canard.

Sous sa direction, les manifestations ouvrières sont systématiquement réprimées, tandis que les camelots du roi défilent tranquillement. À la Chambre comme dans la presse de gauche, son nom évoque la violence policière et le mépris de la liberté d’expression. Quelques mois plus tard, il sera limogé par Daladier, déclenchant la colère de l’extrême droite — colère qui débouchera, le 6 février 1934, sur les émeutes de la place de la Concorde. Autant dire que Châtelain-Tailhade le voit venir.

Une fausse interview, vraie démolition

L’article prend la forme d’un entretien fictif, mené par un journaliste goguenard face à un préfet persuadé de « s’intéresser à la santé physique et morale des Parisiens ». Scène surréaliste : Chiappe, en grand seigneur de l’ordre, détaille son programme. Première mesure : « à partir de dix-sept heures, suppression totale du vermouth-cass, picon-cacao et autres cochonneries ». Ensuite : obligation pour les cinémas de fermer plus tôt, et interdiction des sorties tardives. Résultat espéré : « tout le monde au pieu ».

Châtelain-Tailhade pousse l’ironie jusqu’à l’absurde. Son Chiappe se vante de rendre Paris « aussi ennuyeux que la pluie », de chasser « Zimmer et Louis Verneuil » comme on expulse des microbes, et de confier à ses agents des « talonnettes en caoutchouc » pour matraquer en silence. Derrière le comique, une critique cinglante : celle d’un pouvoir policier obsédé par la discipline des corps, la censure des plaisirs et la mise au pas de la ville.

Le préfet, caricaturé en petit despote hygiéniste, incarne ce que le Canard déteste : l’autorité paternaliste qui prétend “protéger” les citoyens contre eux-mêmes. L’humour de Châtelain-Tailhade, faussement naïf, ridiculise cette hypocrisie morale. Quand Chiappe prétend « opérer la transition sans heurts », le journaliste lui répond du tac au tac : « C’est toujours votre faux-col qui me gêne. » Sous la plaisanterie, tout un système : celui de l’ordre bourgeois sous col amidonné.

Le Paris de la matraque et du couvre-feu

Dans ce faux dialogue, chaque phrase de Chiappe sonne comme une parodie du discours sécuritaire : « Je m’efforce, en toute conscience, d’opérer cette transition sans heurts maladroits, au besoin des accommodements et des délais, mais sans jamais sacrifier à des commodités d’humeur particulière. » Derrière la langue administrative, Châtelain-Tailhade laisse percer la brutalité réelle : le préfet se rêve chirurgien social, qui tranche dans le vif au nom de la santé publique.

L’allusion aux “trublions” et aux “pacifistes présumés” n’est pas gratuite : depuis les grèves et les cortèges de 1932, Chiappe a multiplié les interdictions de manifester, justifiant les coups de matraque par la défense de la République. Le Canard, fidèle à sa mission de contre-pouvoir, retourne l’argument : la vraie menace pour la République, c’est cette police qui se prend pour la morale incarnée.

La conclusion est magistrale. Le journaliste, quittant la Préfecture, croise les élus socialistes au bistrot d’à côté : « À minuit passé, on levait encore son verre à la santé de ces ballots d’électeurs qui se figurent qu’on les paye pour exprimer leurs opinions. » C’est tout le Canard qui parle : la satire s’étend du préfet à la classe politique tout entière, complice par lâcheté de l’ordre établi.

Une satire prémonitoire

Sous l’humour, un pressentiment : celui d’une France où la République parlementaire s’enfonce dans l’autoritarisme. Deux ans avant les émeutes de 1934, Châtelain-Tailhade décrit déjà un pouvoir prêt à “assommer” ses contradicteurs pour maintenir une illusion de stabilité. Ce Chiappe de comédie, tout gonflé de vertu, annonce déjà la figure tragique du préfet d’ordre, que la droite transformera en martyr après sa destitution.

Mais pour le Canard de 1933, il n’est encore qu’un pantin grotesque, symbole d’un Paris bridé, policé, qui confond discipline et décomposition.