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N° 871 du Canard Enchaîné – 8 Mars 1933

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L’Allemagne a voté ! Hitler est, à la réflexion, un grand ami de la France

Le 8 mars 1933, Pierre Bénard signe dans Le Canard enchaîné un article d’une ironie prophétique : « Adolf Hitler est, à la réflexion, un grand ami de la France. » Sous ce titre provocateur, il démonte la naïveté des milieux politiques et économiques français, ravis de voir un dictateur “mettre de l’ordre” en Allemagne. En une semaine, l’humour noir du Canard devient clairvoyance politique : derrière le “bon voisin” qu’on salue, c’est le futur bourreau de l’Europe que Bénard voit déjà se lever.

 

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Quand le Canard “remercie” Hitler : la satire au vitriol de Pierre Bénard

Le 8 mars 1933, Le Canard enchaîné consacre sa une à un article de Pierre Bénard au titre provocateur : « Adolf Hitler est, à la réflexion, un grand ami de la France ». Ce n’est pas un éloge, bien sûr, mais une mise à nu des illusions françaises face à l’arrivée du nazisme. Bénard déploie une ironie si implacable qu’elle en devient glaçante : il montre comment, en quelques semaines, la peur du communisme, l’esprit d’affaires et l’aveuglement patriotique conduisent la France “bien pensante” à considérer le Führer comme un partenaire respectable.

L’Allemagne a voté, la France se rassure

Le dessin de Guilac, en haut de page, plante le décor : un Hitler minuscule, entouré de clones à croix gammées. La légende, cinglante, annonce : « Victoire ! Le nombre des votants va bientôt dépasser celui des électeurs. » Le ton est donné : la parodie électorale allemande n’a rien d’une démocratie. Mais l’ironie du Canard vise moins Berlin que Paris.

Bénard débute par un constat faussement apaisant : « Adolf Hitler est au pouvoir en Allemagne, et comment ! À part les journalistes étrangers qu’il expulse, les autres sont bien disposés à ne plus voir en lui seulement un peintre en bâtiment… » La formule cloue au pilori les rédactions et les salons français qui, au lieu de s’alarmer, s’emploient déjà à “comprendre” le nouvel homme fort.

Le journaliste cite même Gustave Hervé, ancien antimilitariste devenu nationaliste fanatique, qui salue dans La Victoire le “bon type” qu’est Hitler, “prêt à tout pour la paix” — une phrase que Bénard retourne comme une gifle. L’ironie repose sur un paradoxe brutal : l’extrême droite française, qui exècre l’Allemagne depuis 1918, se réjouit soudain de voir un dictateur s’y installer, pourvu qu’il promette l’ordre et qu’il écrase les communistes.

Les milieux d’affaires et la “bonne paix”

Sous couvert de reportage, Bénard déroule une comédie d’une effroyable lucidité. Il cite le Financier de l’Éclaireur de Nice qui se félicite déjà du “bon sens” d’Hitler, ou un banquier qui trouve “excellente” l’arrivée du chancelier, puisqu’elle “mettra de l’ordre dans les affaires”. Cette ironie indirecte vise les milieux économiques français, qui voient dans le nazisme un facteur de stabilité pour le commerce européen — et un excellent débouché pour l’industrie d’armement.

« On est d’accord pour penser que la présence d’Hitler ne peut qu’être bénéfique… », écrit Bénard avec un ton de faux sérieux. Puis il ajoute, venimeux : « On voit qu’on a eu bien tort de s’affoler (...) un type tout ce qu’il y a de bien, avec lequel il y aura moyen de moyenner. »

Les sections suivantes — “Au Creusot”, “Chez M. Poincaré”, “Chez le général Weygand” — sont autant de tableaux satiriques où Bénard fait parler les représentants de la droite, des industriels et des militaires français. Chacun y trouve sa raison de se réjouir : les premiers voient déjà les commandes d’armes revenir, les seconds espèrent la fin du désarmement imposé par la SDN, et les derniers se félicitent de retrouver “un vrai soldat” en face d’eux.

La caricature est si précise qu’elle frôle le documentaire. Derrière le rire, un effroi perce : celui d’une société qui se prépare, sans le savoir, à pactiser avec le pire.

La lucidité précoce d’un satiriste

Le génie de Bénard, c’est de transformer la complaisance bourgeoise en miroir : plus son texte avance, plus l’“amitié” pour Hitler devient obscène. « Chez M. Poincaré », écrit-il, “on se félicite d’une excellente chose : le Parlement va enfin redevenir ridicule, et l’on va pouvoir passer des commandes…” Chaque citation inventée sonne vraie.

En mars 1933, Hitler vient d’obtenir les pleins pouvoirs, la répression s’abat sur les communistes allemands, et l’incendie du Reichstag (27 février) sert déjà de prétexte à la terreur d’État. Pourtant, dans la presse française, nombreux sont ceux qui minimisent la menace. Pierre Bénard, lui, voit clair : sous le vernis du pragmatisme et du “bon sens économique”, il décèle le glissement moral d’une Europe prête à fermer les yeux pour sauver ses marchés et son confort.

Son ironie, comme celle de ses collègues du Canard, s’inscrit dans une longue tradition : celle de l’humour défensif contre la bêtise des puissants. Mais ici, la satire prend une résonance tragique. En intitulant son article « un grand ami de la France », Bénard ne raille pas seulement l’hypocrisie française : il pressent le drame à venir — une France que l’aveuglement conduira, quelques années plus tard, à l’effondrement et à la collaboration.

“Rire pour ne pas pleurer”

La page du 8 mars 1933 est l’une des plus percutantes de toute cette période. Loin du simple canular, elle annonce la ligne que le Canard enchaîné tiendra tout au long des années 1930 : lucidité, sarcasme, refus du suivisme. À travers ses fausses “bonnes nouvelles” et ses “témoignages” imaginaires, Bénard dénonce une réalité plus inquiétante encore : celle d’une opinion publique fatiguée, prête à applaudir l’ordre plutôt que la liberté.

Ce rire — cinglant, prémonitoire — est déjà un cri.


 

L'Allemagne a voté ! Hitler est, à la réflexion, un grand ami de la France 

Dessin de Henri Guilac

Si le maréchal Paul von Hindenburg bat nettement Hitler à la présidence du Reich en 1932, il doit cependant se résoudre à le nommer chancelier le 30 janvier 1933, compte tenu de la montée en puissance du parti national-socialiste allemand (NSDAP), afin de redresser le pays économiquement et d'enrayer la menace communiste.

Dans son article, Pierre Bénard - 2ème rédacteur en chef de l'histoire du Canard après Victor Snell - ironise sur la nouvelle respectabilité acquise par le leader fasciste allemand, que certains considèrent comme "un type tout ce qu'il y a de bien, avec lequel il y aura moyen de moyenner, pourvu qu'on soit dans la fabrication des canons".

Parmi eux, une vieille connaissance du Canard: Gustave Hervé, directeur du journal La Guerre sociale, devenu La Victoire en 1916, élu "Grand chef de la tribu des bourreurs de crâne" dans le numéro 51 du 20 juin 1917. En évoquant "le drapeau dans le fumier", Bénard fait allusion à un vieil article d'Hervé, écrit en 1901, à l'époque où il était un ultra-pacifiste virulent, ce qui lui valut d'être révoqué de son poste de professeur d'histoire. Il passa à l'ultra-patriotisme en août 1914 (popularisant l'expression "changer son fusil d'épaule") et fut alors surnommé "l'enragé volontaire".

En octobre 1933, l'Allemagne quitte avec fracas la Société des Nations (S.D.N.) et la Conférence mondiale pour le désarmement et poursuit une reconstitution progressive et clandestine (en violation des dispositions du Traité de Versailles) de son potentiel militaire.

SP